On
dit que Victor Hugo avait prononcé une défense de
mettre en musique ses poésies. Dans le GRAND DICTIONNAIRE
UNIVERSEL DU XIXe SIECLE de Pierre Larousse (cité ici
d'après la version DVD-ROM éditée par les
Dictionnaires Le Robert et la maison Redon), on peut lire à
propos de Gastibelza, le Fou de Tolède,
poème mis en musique par Hypollyte Monpou : « Si les vers
de Victor Hugo ont un peu vieilli, le chant a gardé toute sa
fierté, sa hardiesse et sa nouveauté, et fait date dans
l'histoire de la romance française.» Tout l'article
peut être relu en bas de page (copie graphique). Pour rappeler,
cette constation a été faite vers 1876 et montre que les auteurs, un peu
pris dans le piège du goût du jour, semblent bien
considérer que Victor Hugo, encore vivant, est
déjà démodé. Il convient peut-être de
faire suivre ici un petit extrait de l'interview mené par
Philippe Nemo avec Georges Brassens pour France Culture en 1979
(à peu près cent ans plus tard) :
« GEORGES BRASSENS :
Vous
savez : la Ballade des dames du temps jadis, par exemple, que
j’ai mise en musique, a marché manifestement pour la musique, parce que la
plupart des gens qui l’ont entendue – je ne parle pas des gens cultivés, bien
sûr, mais je parle de ceux qui vont au music-hall –, ont connu la Ballade
des dames du temps jadis , parce que je l’ai mise en musique. Or, c’est
une de mes rares prétentions, mais enfin…
PHILIPPE NEMO :
Mais c’est le miracle d’une rencontre quand même, parce
que LA LEGENDE DE LA NONNE c’est un poème magnifique que j’ai connu, moi, ... par
votre chanson…
GEORGES BRASSENS :
Vous, vous l’avez connu,
mais bien des gens n’ont pas connu ça.
PHILIPPE NEMO :
Non, par votre chanson.
GEORGES BRASSENS :
Parce
que vous devez être d’une génération qui
succède à celle qui prenait Victor Hugo pour un con.
Voilà… Victor Hugo, hélas ! Victor Hugo est l’un des plus grands poètes.
PHILIPPE NEMO :
Mais c’est l’un des plus grands écrivains qui aient
jamais existés.
GEORGES BRASSENS : Et poète aussi.
PHILIPPE NEMO : Et poète ?
GEORGES BRASSENS :
Bien sûr. Mais l’on ne le
lit plus. La plupart des gens aujourd’hui décident de tout sans connaître. La
plupart des gens parlent des choses qu’ils ne connaissent pas. C’est pour ça
que moi je suis si réticent quand on me demande de parler, parce qu’il y a
tellement peu de choses que je connaisse que je fais attention à ce que je
dis... »
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